L’analyse des réseaux permet de comprendre ce qui semble universel et ce qui est particulier à chaque société.
Les réseaux sont constitués par des personnes dont la relation repose dans un premier lieu sur la famille élargie (famille et alliance). La base scolaire des réseaux est aussi importante et constitue souvent la seconde assise de cette organisation (HEC, SUPCO), les université américaines (Harvard, MET, etc.). Enfin d’autres bases existent : religieuse (franc-maçonnerie), politique...
Le réseau est donc fondé sur une expérience commune produite à un moment de l’itinéraire du cycle de vie. Les différents réseaux peuvent être mobilisés par rapport aux objectifs que la personne s’est assignée (familiaux ou professionnels).
Les Mourides du Sénégal constituent un réseau particulier à travers toute l’Afrique. Les Mourides constituent une confrérie musulmane (religion) dont la puissance s’est organisée autour de la culture de l’arachide (économie). La forte migration mouride permet à ces derniers de se rendre dans l’ensemble des pays africains et de vivre du commerce d’objet d’art (commerce).
Toutes les sociétés fonctionnent à base de réseau.
La relativité historique des réseaux.
Bergin, dans son livre sur Richelieu décrit le clientélisme que ce dernier aurait utilisé pour parvenir à ses fins. Il aurait pendant son ministère, triplé le nombre des fonctionnaires de l’administration qu’il contrôlait. Il offre donc des postes en fonction des appuis politiques qu’il obtient. D’autre part la caisse de Richelieu fonctionne à double sens ce qui signifie qu’il puise dans les caisses de l’Etat pour remplir sa cassette, mais que celle-ci est aussi utilisée à des fins destinées à servir l’Etat. Il n’y a pas de distinction entre bien public et bien privé. Cette notion est d’ailleurs toute relative et dépend des sociétés, elle est d’autant plus difficile à effectuer que la marge est étroite entre fonctionnaire et société civile.
Max Weber montre la constitution des Etats nationaux et la manière dont se créent les identités nationales dans Economies et Société : le savant et le politique. Il s’efforce de montrer qu’il y a une recherche pour séparer la société privée des activités publiques. Cela s’effectue à son avis par la création de règle impersonnelles qui ont pour fonction de lutter contre le clientélisme et les réseaux. La démocratie existe lorsqu’il y a passage d’un Etat fondé sur le clientélisme, donc un pouvoir personnel, à un pouvoir impersonnel, où le système des réseaux ne peut pas fonctionner. Or on assiste actuellement à un Etat disposant d’une autonomie relative, à un pouvoir impersonnel (même trop parce qu’irresponsable), mais le système de clientélisme est encore très prégnant ; ce n’est plus un clientélisme personnel, mais de système (ENA, corps des mines, X, etc.) Les Etats ne peuvent pas être autonome du fonctionnement de la société ; ils en sont le reflet le plus direct et le plus cru.
Lorsqu’il y a corruption, en Occident, ce qui est condamnable c’est le détournement d’argent à des fins personnelles. Dans de nombreux pays, notamment en Afrique, ce n’est pas le détournement qui est condamnable, mais le fait de ne pas redistribuer les sommes détournées.
Une autre constatation qui peut être faite concerne la puissance des partis communistes. On note que l’Europe catholique du sud donne des PC forts (France, Italie, Espagne) alors que les pays protestants favorisent la social-démocratie. Ceci semble résulter du fait que marxisme et christianisme reposent sur une critique de la richesse alors que dans les pays de la Réforme l’accent est mis sur la redistribution des richesses. Or c’est dans ces cultures à redistribution de richesses que l’on trouve le clientélisme le plus fort.
L’Etat et les réseaux en Afrique
Lors des indépendances, les Etats se sont créés, mais il a fallu constituer les appareils administratifs ; ceux-ci ont été réalisés à partir des groupes ethniques. Or l’ethnie est un groupe auquel les personnes peuvent se référer et revendiquer son appartenance ou sa non appartenance à ce groupe. L’ethnie peut donc être considérée comme un réseau, un groupe de pression. Les clientèles se forment sur des bases ethniques ; cela signifie le ralliement à tel ou tel système puisqu’il y a finalement personnalisation (patrimonialisation) du système.
Pour comprendre les sociétés, il faut analyser les réseaux qui structurent la société. Toute société est structurée en réseaux. Ces réseaux peuvent être officiels et officieux (mafieux). Les réseaux mafieux reposent sur la prostitution, la drogue et la vente d’armes. Les Etats de droit, donc structurés permettent une moindre évolution des sociétés de type mafieux.
Eviter d’associer réseaux et théorie de conspiration du pouvoir.