Limites de l'action de la CIJ
Confinement aux conflits limités et marginaux
Depuis 1945, la CIJ est restée impuissante en ce qui concerne les conflits majeurs entre États et par conséquent politiquement plus sensibles, faute de saisine volontaire par les États. Son action a donc été limitée aux conflits marginaux. La CIJ a même eu un rôle dissuasif, une fois saisie, amenant les États à s'entendre directement entre eux : ce fut le cas pour l'affaire Certaines terres à phosphates à Nauru (1993), opposant Nauru à l'Australie, qui vit finalement le désistement à l'instance des deux parties. Durant les années 1970, beaucoup d'États ont même refusé de comparaître devant la CIJ ; d'autres ont retiré leur déclaration facultative de juridiction obligatoire après des décisions leur ayant été défavorables (France en 1974 après Essais nucléaires et États-Unis en 1986 après Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua).
La CIJ s'est même auto-limitée pour ne pas se discréditer dans le cas d'affaires sensibles. Ainsi, elle a refusé de statuer au fond pour Essais nucléaires (Australie c. France et Nouvelle-Zélande c. France, 1986) et Sud-Ouest africain (Éthiopie c. Afrique du Sud et Libéria c. Afrique du Sud, 1966). Devant les refus de comparution, elle a souvent adopté une position de retrait : elle jugeait qu'il n'y avait alors pas compétence, ou que l'affaire était devenue de fait sans objet.
Concurrence d'autres modes de règlement pacifique des différends
La CIJ n'est pas le seul moyen de règlement pacifique des différends mis à la disposition des États. L'art.33 de la Charte en précise un certain nombre :
Les parties à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent en rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix.
La multiplication des instances judiciaires internationales vient également limiter le champ d'action de la CIJ. On peut citer le Tribunal international du droit de la mer, né de la Convention de Montego Bay de 1982, qui empiète directement sur les compétences de la CIJ en matière de délimitation maritime. La création en 1993 du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY) puis en 1994 du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et en 2002 de la Cour pénale internationale (CPI) peuvent également introduire des conflits de compétence.