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 la mondialisation de l'(in)sécurité? 4

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Mr ABED
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Mr ABED


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MessageSujet: la mondialisation de l'(in)sécurité? 4   la mondialisation de l'(in)sécurité?  4 Icon_minitime16/8/2008, 23:05

Polices en réseaux, polices à distance : les effets des archipels institutionnels
Les activités de police se sont étendues. Elles se font en connectant les différentes institutions, elles se font en réseaux. Elles se font aussi en englobant un nouveau spectre large d’activités et en le projetant bien au-delà des frontières nationales. Ces mises en réseaux géographiques, en termes de mission, en termes d’institutions déterritorialisent les activités de police (y compris judiciaire avec la mise en place d’un Eurojust). Ces activités de police, en particulier celles de surveillance et de prévention des désordres à l’ordre public se font maintenant à distance, au-delà des frontières nationales avec l’envoi d’experts invités lors de matchs de football dits à risque, ou lors de manifestations pour des contre-sommets. Mais ces activités dépassent celles des seuls policiers envoyés à l’étranger. Elles touchent, avec l’envoi de conseillers de sécurité intérieure, les consulats pour la délivrances des visas afin d’entrer dans la zone Schengen, les compagnies aériennes avec la délégation des opérations de vérification des passeports, les militaires en opérations de consolidation de la paix et à qui on demande de surveiller les activités mafieuses de ces pays, les services de renseignement avec le partage des bases de données… Toutes activités qui participent à ce qu’on appelle des « retours de sécurité intérieure » où la surveillance se projette sur les terrains, les Etats, les personnes jugées dangereuses.
Cet au-delà géographique dépasse non seulement les frontières nationales avec les activités Schengen et celles des officiers de liaison, mais aussi les frontières actuelles de l’Union européenne avec les exigences auprès des pays candidats, et même au-delà de l’Europe des 25 concernant d’une part la conditionnalité entre aide économique au « cercle d’ami », et d’autre part leur acceptation d’activités de police et d’immigration des pays de l’Union sur leur territoire.
Ces activités de police sont en même temps l’objet d’une redéfinition qui en élargit singulièrement le spectre. L’idée qu’elles seraient principalement tournées vers le crime ou la lutte antiterroriste est fausse. L’activité principale est la mise à distance des étrangers les plus pauvres, le contrôle des flux de circulation. C’est au prix d’une activité rhétorique intensive de plus de quinze ans que l’on a créé dans les esprits l’idée que ces phénomènes sont intimement corrélés, mais ceci reste éminemment discutable. La corrélation crime, étranger, pauvreté est fausse32.
Le terme de sécurité intérieure utilisé à l’échelon européen est un indicateur de cette double extension : extension géographique, d’une part, avec la dimension de la coopération européenne (et transatlantique ?), extension du rôle et des tâches des diverses agences affectées à la sécurité, d’autre part. L’extension géographique et la redéfinition des sphères de compétence qu’elle implique a fait l’objet de nombreux commentaires, même si l’on a mal pris la mesure des changements impliqués au quotidien par le report théorique des contrôles des frontières dites intérieures aux frontières dites extérieures de l’Europe, et si l’on croit trop vite à la suppression des contrôles aux frontières intérieures alors qu’on les a modernisés et délocalisés mais pas supprimés. En revanche, on est resté discret tant chez les professionnels de la sécurité que chez les hommes politiques sur l’extension des activités liées au contrôle des flux transnationaux de personnes, ajoutées maintenant dans la définition de la sécurité aux tâches traditionnelles de contrôle du crime. La sécurité intérieure inclut en effet au niveau européen dans un même continuum la lutte contre le terrorisme, la drogue, la criminalité organisée, la criminalité transfrontière, l’immigration clandestine, ainsi que le contrôle des flux transnationaux de personnes (migrants, demandeurs d’asile, circulation transfrontière), voire même le contrôle de tout citoyen qui a priori ne ressemble pas à l’image sociale que l’on a de l’identité nationale (jeunes issus de l’immigration, groupes minoritaires...). Ce contrôle élargit donc au-delà du contrôle classique du crime et de la police des étrangers, les activités policières en y incluant le contrôle de personnes que l’on surveillera en raison d’un type d’identité et de comportements supposés en dériver dès lors qu’elles traverseront les frontières ou vivront dans des zones dénommées « à risque » : banlieues, centre villes dégradés...
Cette extension des activités favorise une nouvelle logique de surveillance plus individualisée et se fait en faveur des ministères de l’Intérieur et de la Justice, dans la mesure où, justement, ils ont su combiner celle-ci avec la mise en place au niveau de la collaboration policière européenne d’un réseau de relations entre fonctionnaires leur permettant de connaître la situation au-delà de leurs frontières. Il en résulte une capacité d’expertise sur l’étranger qui permet de parler d’une internationalisation des ministères chargés de la sécurité intérieure. Sans être à somme nulle, cette extension se fait dans le même sens que celle qui affecte les douanes et elle s’effectue au détriment des ministères sociaux (Travail) ou spécialisés (Affaires européennes). Elle va jusqu’à faire chevaucher les sphères d’activités du ministère de l’Intérieur avec celles des ministères tournés vers l’international : Affaires étrangères et Défense. Les ministères de l’Intérieur prennent ainsi des initiatives en matière de politique étrangère dès que la conduite de celle-ci peut avoir des répercussions en matière de sécurité intérieure.
Comme de nombreux livres l’ont signalé, les polices nationales se structurent en réseaux différenciés en puisant dans les ressources de l’international selon les activités professionnelles spécialisées (drogue, terrorisme, maintien de l’ordre et hooliganisme…) et ne forment donc pas un seul réseau policier unique et homogène. Il vaut mieux parler d’archipel des polices ou de mosaïque regroupant polices nationales, polices à statut militaire, douanes, agences d’immigration, consulats et, même, services de renseignement ou militaires dans les opérations de police internationale dans les Balkans. Ces archipels policiers sont structurés, outre par l’activité, selon des lignes d’identification en termes de nationalité (Français, Britanniques, Allemands... ou Européens du Nord et du Sud) de métier (policiers, gendarmes, douaniers), mais aussi d’organisation (nationale, locale, municipale) de mission (renseignement, contrôle frontalier, police criminelle), de savoirs (perception des menaces, des adversaires prioritaires), d’innovation technologique (systèmes informatiques, surveillance électronique, officiers de liaison).
Le champ de la sécurité se structure depuis longtemps à travers ces échanges d’informations transnationaux, à travers la routinisation du renseignement, et il est naïf d’y voir un simple effet de la globalisation. Les polices nationales, dès leur création comme institutions, ont été en réseaux : réseaux au pluriel et non réseau au singulier, réseaux structurés et délimités par des socialisations professionnelles et des conceptions du métier s’opposant les unes aux autres et créant de fortes solidarités professionnelles entre nationalités différentes – solidarités qui transcendent les solidarités nationales et s’imposent de plus en plus à elles, malgré les efforts des hommes politiques, au niveau des chefs de gouvernement, de reprendre la main. Ainsi polices judiciaire et de renseignement obéissent à des logiques profondément différentes quant à la suspicion, au moment où il faut arrêter un suspect, aux bases légales et aux formes de procédures qu’il faut respecter, et à la notion d’efficacité policière. Les jeux se structurent par écarts distinctifs entre un pôle représenté par une conception de la règle de droit dont les magistrats du siège et les avocats sont les représentants, jusqu’à un pôle représenté par la règle de la raison de gouvernement dont les services spéciaux et les services actions militaires sont les acteurs les plus significatifs. La police de renseignement, au contraire de la police judiciaire, s’est ainsi toujours faite au-delà du territoire, sur les identités, réelles ou empruntées, des personnes, et non sur leur seule localisation. Elle se préoccupe de connaître les intentions stratégiques de l’ennemi déclaré et non d’arrêter l’un d’entre eux. Elle place l’efficacité bien au-delà du respect des règles de droit et s’inquiète peu de la légitimité, en s’autorisant de l’exception pour se justifier. C’est pourquoi la police en général n’est pas tant contrainte par la souveraineté territoriale, contrairement à la justice. Dès la fin du dix-neuvième siècle la collaboration policière était très active contre les « subversifs ». Et c’est à ce moment que se sont différenciés les services policiers et militaires de renseignement33. Mais c’est surtout à partir des années 1970 avec la création des clubs de Berne et de Trévi que l’européanisation va activer un approfondissement des relations, au-delà de la collaboration via Interpol qui elle-même remontait aux années 1920. Au niveau européen, le thème de la libre circulation et du contrôle des frontières revient en force dans les années 1980. Les catégories juridiques sont mises à mal par ces transformations : distinction des frontières intérieures et extérieures de l’Union, création de zones d’attente internationales dans les aéroports, tentative d’imposer la terminologie de réfugiés économiques et de restreindre la portée du droit d’asile, utilisation de la catégorie d’immigré en lieu et place de celle d’étranger, et relativisation de cette dernière au profit de celle entre communautaire et extra-communautaire. Seulement, faute de pouvoir refouler et tenir les frontières comme l’affirment les rhétoriques sécuritaires, chaque organisme, chaque pays, individuellement ou en liaison avec d’autres, cherche en pratique à bloquer les flux transfrontaliers en amont, dans les pays d’origine, et à reporter le poids du contrôle effectif des flux et du crime sur les autres polices34.
Il en résulte une disjonction profonde entre les discours sur la sécurité en Europe et les pratiques constatées. Les frontières extérieures sont parfois des lieux d’arbitraire, mais ne sont en aucun cas un cordon électronique de sécurité efficace. Les frontières terrestres sont très facilement franchissables et les polices laissent parfois passer les candidats à l’entrée, s’il est clair qu’ils ne resteront pas sur le territoire du pays qui contrôle. Les frontières intérieures en revanche ne sont en aucun cas démantelées en termes de contrôle comme le voudrait la rhétorique de la libre circulation et des mesures compensatoires. Les contrôles sont privatisés, reportés vers les compagnies aériennes et les aéroports qui engagent à leur tour des compagnies de gardiennage privé35. Ils sont aussi déplacés parfois simplement de quelques kilomètres mais maintenus. Et c’est surtout via les visas et le contrôle dans les consulats des pays d’origine que s’exerce le plus gros du travail policier. C’est l’articulation du SIS et des visas qui structure les pratiques de contrôle, d’où l’accent mis sur la lutte contre les faux documents et la tentation de généraliser des cartes infalsifiables d’identité fondées non plus sur les empreintes mais sur d’autres technologies (ADN, rétiniennes…) dont l’accord de Prüm (ou Schengen 3), entre sept pays (Benelux, Allemagne, Autriche, Espagne et France), conclu dans le plus grand secret fin mai 2005, est un exemple frappant. Ces technologies, permettant de surveiller et de punir au-delà des frontières via la collaboration entre agences de sécurité, se multiplient. Cela polarise le métier de policier. Deux grands types de police se font jour au sein de l’institution police nationale ; le premier emploie du personnel peu ou non qualifié qui doit être visible et proche localement. Il est l’auxiliaire de la justice pénale, du maire, du préfet ou de l’autre police. Il est concurrencé par le privé. Le second type emploie à l’inverse peu de personnes, hautement qualifiées, en contact avec les autres agences de sécurité et de contrôle social, personnes dont la discrétion et la distance sont les deux principales caractéristiques36. En soi-disant osmose avec les hautes sphères gouvernementales et les acteurs privés stratégiques, ces individus se donnent comme mission de prévenir le crime en agissant sur ces conditions de manière active, en anticipant d’où il viendra et par qui. Il s’agirait de faire de la « prospective » à partir des évolutions, de devenir le lieu de réflexion sur l’ensemble des évolutions sociétales. Monter des cellules de renseignement couplant les informations ouvertes, les savoirs des sciences sociales, et un renseignement opérationnel policier technique et humain est alors l’ambition de tous ces professionnels qui s’estiment plus professionnels et compétents que les autres. Ce rêve d’une communauté épistémique commune et consensuelle hante l’imaginaire de ces professionnels qui piloteraient à distance – géographique et temporelle via l’anticipation – les évolutions sociétales. Ils seraient dans un lieu virtuel d’où ils pourraient tout voir, tout en étant si discrets qu’on ne les verrait pas et que l’on ne connaîtrait que leurs exécutants – les masses policières, les juges et les gardiens de prison. La gestion de la population est moins celle du troupeau à garder que celle du suivi des transhumances via des logiques proactives.
La surveillance à distance, qui vise à contrôler la circulation des flux, passe par les pratiques des sas, des filtres ou des écluses (visas, contrôles par les compagnies aériennes, contrôles aux aéroports, renvois, réadmissions). Elle débouche, non pas sur la libre circulation, mais sur les lieux d’enfermement non reconnus comme tels (centres de rétention et zones d’attente)37. Elle institue une fonction policière délocalisée dans les consulats placés dans les pays d’origine et qui est bien moins visible que la police des frontières. Le refus de visa devient la première arme des polices et c’est là d’ailleurs où l’arbitraire des décisions est le plus fort. La pratique policière vise alors la surveillance des étrangers ou des minorités ethniques qui sont pauvres et à élargir son champ d’action au-delà de la recherche du crime, en mettant en avant des logiques proactives qui permettraient de repérer des groupes « criminogènes » grâce à un savoir sociologique. La figure du coupable change : ce n’est plus le criminel mais l’« indésirable ». Les prisons qui enfermaient les coupables sont moins significatives dans ce dispositif que ces nouveaux lieux d’enfermement comme les zones d’attente qui en reproduisent les conditions matérielles, la culpabilité judiciaire en moins. Le relâchement de la surveillance individuelle, trop lourde, trop maximaliste se fait alors au profit du recueil global d’informations et du ciblage sur les groupes qui circulent le plus : les diasporas, les migrants et, si l’hypothèse est juste, bientôt les touristes. Elle se fait aussi sur les bases d’une délimitation dans les pratiques de l’islam entre le bon islam et l’islam radical susceptible d’alimenter en hommes les organisations clandestines. La suspicion à l’égard de tous qui est discursivement centrale s’infléchit de facto vers un contrôle spécifique de certains, un Ban.
Pour rendre compte de ces archipels institutionnels engagés dans des activités de sécurité intérieure (se projetant aussi à l’extérieur), j’ai repris la notion de champ en l’appliquant à ces professionnels privés ou publics, qui, au nom de la sécurité ou de la bonne conduite de notre vie, gèrent les technologies de protection, de contrôle et de surveillance et veulent nous dire de qui et de quoi on doit avoir peur et ce qui est inéluctable.
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